Une haussmannisation cinématographique. C'est bien ça. L'Amour existe, court-métrage de Maurice Pialat, chef-d'oeuvre du Cinéma, ouvre une brèche, creuse des tunnels de pensée, des boulevards de réflexion face aux idées toutes faites, les ruelles de préjugés qui fondent la pensée unique, les symboles d'une république, la nôtre, avec l'Arc de Triomphe, les statues qui meurent (aussi) face à un regard différent, celui d'un Cinéaste, d'un poète qui ne se met pas en retrait, comme on peut le croire (un autre préjugé) mais qui se place dans son élément, celui qui est étudié, ici, la ville, les banlieues, le manque de culture, de tranquilité, les transports en communs, l'éducation, la pollution, les premières amours, les monuments, le travail, la récompense, les fausses libertés et les vraies contraintes...Tout ceci, Pialat le montre, le décortique, l'analyse, chaque son, chaque mot, chaque plan est pensé, réfléchi et inséré là où il faut, là où se trouvent les failles de la société...C'est pourquoi le réalisateur a pu brandir le Poing de la Victoire 26 ans plus tard à Cannes, ce regard jeté sur ce qui fait mal et dérange...par manque de réponses aux questions posées par le Cinéaste...Le pessimisme absolu de ce film, malgré son titre, ne peut mener qu'à un acte et deux volontés: celle du politique qui voudra changer la société en corrigeant ses défauts, mais, faute de liberté, il sera bloqué et ne tiendra pas ses promesses (et parfois ses convictions), celle du citoyen qui, à la vue de L'Amour existe, réfléchira sur son quotidien, sa volonté de changer sa vie, et, peut-être y arrivera-t-il en refusant tout net la société, au détriment de sa survie. Pour conclure, citons Brassens (qui s'accorde ici avec Pialat) lors de sa conversation avec Brel et Ferré à propos des changements à apporter dans le monde: Je ne sais pas ce qu'il faut faire...Si je savais ce qu'il faut faire, si j'étais persuadé qu'en tournant à droite ou à gauche, qu'en faisant ceci ou cela le monde va changer, vous pensez bien que je le ferai. Je la sacrifierai ma petite tranquilité, mais c'est parce que je n'y crois pas tellement...
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