samedi 7 novembre 2009

Redacted de Brian De Palma

Redacted est le film qui brave les interdits. Celui qui montre ce que l'on peut pourtant voir. Une réalité que l'on ose à peine affronter, qui est vue dans les journaux télévisés, avec une flaque de sang s'étalant sur le sol. Cette réalité n'est pas montrée, tout est succinct, non réfléchi. La télévision ne nous montre que des métonymies, des parties pour le tout. Brian de Palma est ambitieux, il veut nous montrer, par l'intermédiaire du Cinéma, d'Internet, de documentaires, de flashs télévisés et de photographies l'horreur de la guerre. Le Cinéma avec les moyens que De Palma s'accorde pour être un narrateur omniscient (lorsque par exemple, la caméra est embarquée dans une voiture qui sera arrêtée par un barrage américain), la mise en scène des images, les photographies qui, même si elles ne sont pas commentées, rappellent La Jetée de Marker. Internet est une grande nouveauté: une page de Youtube sur grand écran, c'est pour le moins impressionnant. Pourquoi ? Simplement parce que Redacted devient un document, une somme de documents, et non plus un documentaire ou une fiction. C'est un nouveau type de Cinéma qui semble être créé. Tout s'enchaîne, les images en mouvement, les dialogues vulgaires, les zooms, les mises en abîme, les tensions entre soldats, entre êtres lors d'un contrôle, le problème du langage est essentiel. Plus de la moitié des Irakiens est analphabète signale la jeune documentariste. Les flashs télévisés, du côté irakien ou américain sont les mêmes. Tous veulent « capter » la vérité par le biais de témoignage(s). Lors du témoignage de Salazar justement, ce dernier affirme qu'il filme impuissant le meurtre d'une irakienne. Le spectateur est aussi impuissant que lui, il devient complice. Le malaise est profond, très profond et c'est sans doute la raison pour laquelle Redacted reçut un accueil catastrophique en Amérique : comme l'a montré Resnais avec Hiroshima, mon amour, De Palma pose sa caméra au sein même de la vérité. C'est sans doute un heureux hasard que les yeux des victimes à la fin du film soient masqués. Le refus de voir, par peur de s'aveugler.

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